Depuis le premier confinement, la littérature prend ses distances avec moi. Plus elle s’éloigne et plus elle me manque. Alors je lis comme je peux. Pas loin de chez moi j’ai découvert la librairie Des Livres et Vous à Saint Jean de Maurienne. J’y reviendrais plus tard dans un article sur le sujet.

Fin septembre, je erre entre les rayons quand tout à coup Ensemble, on aboie en silence me tombe entre les mains. N’allant pas très bien en ce moment, j’hésite à me mettre avec cette histoire. Mais ouvrant la première page, je débute ma lecture, je suis happée. Aussitôt, je referme le livre m’en vais l’acheter pour en profiter calmement.

Ensemble, on aboie en silence est un livre écrit par Gringe (Guillaume Tranchant) et son frère Thibault. Il a été publié par les éditions Harper Collins et Wagram en septembre 2020.

« La boucle est bouclée. Quand on se sent oublié par les siens, on, réussit à s’oublier soi-même.

C’est aussi simple que ça. »

Quatrième de couverture

Mon avis sur cette lecture

Il est difficile d’appréhender le sujet de la schizophrénie puisque nous ne connaissons que peu de choses sur le sujet. Nombreuses sont les idées préconçues et les préjugés sur la question. Guillaume et son frère Thibault se livrent ici, tour à tour. Si l’un est schizophrène, l’autre doit composer avec le trouble de son frère. A chacun ses soucis, à chacun sa manière de vivre avec cette maladie.

Un témoignage touchant et sincère. Gringe ne se cache pas et même dans la peau d’un écrivain, il reste fidèle à lui-même. Ici c’est cash, vrai et dur mais c’est aussi une belle déclaration d’amour fraternel. Les textes de Thibault sont parfois complexes, confus pour nous mais son parcours nous embarque au delà de cette barrière que pourrait fixer sa maladie. Si leurs quotidiens et leurs vies ont été bousculées par l’arrivée de la schizophrénie, cette maladie n’en a pas moins forgé ce qu’ils sont aujourd’hui. Vivre avec, du mieux que l’on peut, c’est ce que ces deux frères ont décidé de faire. Même si leur relation est parfois houleuse, les liens qu’ils ont tissé sont indéfectibles. Ils ont grandi ensemble, avec les fractures de chacun. Si l’un doit apprendre à vivre avec un frère malade, l’autre doit apprendre à vivre avec le regard que porte sa famille sur sa maladie.

Oubliez les dédoublements de personnalité, oubliez la folie, oubliez ce que vous savez. Finalement, si Gringe est devenu célèbre, est-ce parce que sa vie a été chamboulée par celle de son frère ? Thibault ne serait-il pas le véritable artiste, libre de tout imaginer, prisonnier de son propre cerveau débordant ?

« Ca fait toujours bizarre d’avoir des visites de l’extérieur. Quand ils s’en vont, ils emmènent mon grand vide avec eux. Et Quentin, ce rat comme à son habitude, à réussi à s’éclipser avec mon feu. La dernière chaleur d’espoir qui restait à votre humble narrateur. Et c’est ainsi que, sans ce briquet, s’éteignent les lumières de ma raison »

Mon expérience de lectrice

La lecture de Ensemble, on aboie en silence n’a pas été simple. Souvent touchée par les propos j’ai du m’arrêter, respirer et reprendre. J’ai été étourdie par le flots de pensées offertes et nourries par ce livre. Est-ce que ce qui nous arrive n’est finalement pas constamment une forme de « bénédiction » ? Je veux dire, Thibault est ainsi, avec ses singularités qui le rendent si particulier parce qu’il est schizophrène. Il est impossible de le voir autrement alors autant voir ça comme un cadeau le rendant particulier au lieu de le voir comme quelqu’un d’handicapé et bancal. Suite à cette réflexion, il m’est apparu que la vie était ainsi pour tout à chacun, avec nos problèmes à notre hauteur. Mais si nous prenions un peu de distance, ne nous accorderions-nous pas pour valider notre singularité par notre parcours, nos erreurs, nos défauts et nos choix ?

Ce livre m’a rendu nostalgique de l’époque où je vivais avec mes frères. Ensemble, on aboie en silence c’est surtout le lien de deux frères qui se quittent, se retrouvent, ne se perdent vraiment jamais, s’aiment constamment sans jamais se la dire mais tout en se le prouvant par leurs actions. Après ma lecture, j’ai eu envie de prendre mon téléphone et d’appeler mes 3 frères. De prendre ma voiture et de les serrer contre mon coeur. De prendre le large dans nos souvenirs. De s’engueuler parce qu’on ne sait pas faire autrement. De s’aimer, tout simplement.

J’admire ce livre, j’admire le courage qu’il a du falloir pour l’écrire, pour tenter de ne pas se trahir. Même si Gringe dit qu’il le fait pour l’argent, et on s’en fiche un peu au final. On ne peut pas dire de tel mots d’amour et d’engagement sans ouvrir son coeur plus que son compte en banque. Je suis rassurée. Ensuite, je dois avouer avoir acheter ce livre, notamment parce que j’ai vu « Gringe » sur la couverture et que mon instinct premier a été « sait-il manier la plume narrative ». Forme de test, évaluation par un public déjà acquis ? Après les Casseurs Flowters que j’ai chanté à tue-tête, après Bloqués qui m’a fait rire (et pas toujours pour les bonnes raisons), après Comment c’est loin, qui m’a fait pleuré, qui m’a donné envie de rentrer en Normandie, après Enfant Lune qui m’a surpris, j’ai eu peur d’Ensemble, on aboie en silence. Peur d’être déçue par un artiste qui m’avait fait vivre un panel d’émotions, jamais deux fois la même, toujours inattendues. Avec son histoire personnelle, c’est une nouvelle fois le cas et je ne pourrais que dire « merci pour ce témoignage ».

Le regard perdu, j’espère que ce livre fera tomber grand nombre de préjugés, j’espère que la science trouvera de quoi soulager le quotidien des gens atteints de schizophrénie. En attendant, je vous laisse avec ce titre qui va de pair avec le livre …

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

%d blogueurs aiment cette page :